dimanche 17 mai 2009

Le transsexualisme sort du cadre de la maladie mentale


Le transsexualisme sort du cadre de la maladie mentale

par Monica


Le Ministère français de la Santé a annoncé, samedi 16 mai, que le transsexualisme ne devrait bientôt plus être considéré comme une forme d'affection psychiatrique. La Haute autorité de Santé a été saisie afin qu'un décret soit rapidement publié en ce sens.

Jusqu'à présent, les personnes transsexuelles pouvaient bénéficier d'une prise en charge totale, par la collectivité nationale, des soins requis par leur état. Mais cette prise en charge nécessitait qu'elles soient considérées comme atteintes d'une affection psychiatrique dite «de longue durée» (classifiée ALD n° 23) pour «troubles récurrents ou persistants».

Cette classification avait ceci de stigmatisant qu'elle introduisait une confusion entre un trouble de l'identité du genre et une affection psychiatrique.

Le Ministère de la santé envoie un signal à l'occasion de la Journée internationale contre l'homophobie, dont le thème est, cette année en France, la lutte contre la «transphobie», un terme que l'on pourrait traduire par «phobie des personnes transsexuelles».

Cette initiative constitue une étape dans l'acceptation par la société française des personnes transsexuelles.

Le «transsexualisme» est distingué de l'«homosexualité» et du «travestisme», qui impliquent la conscience d'appartenir à son sexe. Il est également distingué des «états intersexuels» dans lesquels les personnes sont anatomiquement et physiologiquement à «mi-chemin» entre homme et femme.

Le «véritable» transsexuel est absolument convaincu d'appartenir au sexe opposé à celui qui est génétiquement, physiologiquement et juridiquement le sien. Son objectif est de faire correspondre son état sexuel (caractères sexuels primaires et secondaires) avec son genre. C'est un problème profond d'identité et non de sexualité.

En 1965, les tribunaux français avaient commencé à être interpellés sur cette question difficile. L'intervention chirurgicale ne réglait qu'une partie du problème et on laissait à la justice le soin de procéder on non au changement d'état civil. En 1982, Henri Caillavet, alors sénateur de gauche démocratique de Lot-et-Garonne avait déposé, sans succès, une proposition de loi tendant à autoriser les traitements chirurgicaux pour le transsexualisme et à reconnaître le changement d'état civil des personnes transsexuelles.

«Chez ces dernières, il y a souvent un dégoût pour les attributs sexuels dont ils souhaitent être débarrassés, disait la même année le Pr René Küss devant l'Académie nationale de Médecine. La vie sexuelle est pauvre, tant pour la libido que pour l'acte lui-même. Ils se disent volontiers en attente d'une sexualité qu'ils espèrent acquérir par leur transformation physique, encore que cet objectif ne soit presque jamais au premier plan de leurs préoccupations, qui restent la transformation corporelle associée au changement d'état civil».

Il ajoutait: «L'histoire du désir de changement de sexe dans le droit humain est au moins aussi vieille qu'Hérodote, qui en faisait le mal de Scythie. Mais ce n'est que depuis trente ans que le transsexualisme a abandonné le domaine du rêve pour devenir réalité réalisable, grâce aux "progrès" de la médecine. La découverte et l'utilisation des hormones sexuelles, l'avènement d'une chirurgie plastique et prothétique, ont permis de donner à l'homme ou à la femme la morphologie corporelle du sexe opposé.»

En 1989, Guy Braibant, alors président de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat, avait remis un rapport sur le transsexualisme. Ce document, rédigé par des juristes et des médecins, préconisait - contrairement à ce qui avait été mis en œuvre dans certains pays - de ne pas légiférer en cette matière. Il conseillait en revanche une série de mesures concrètes qui permettraient de faciliter le changement de sexe dès lors qu'il était médicalement et socialement justifié.

«Depuis les premières demandes, le droit français a connu une évolution importante», observait le rapport Braibant. Aucun texte ne règle le problème du transsexualisme ni ne définit la manière dont doit être déterminé le sexe des individus. Mais aucun texte n'interdit non plus de modifier la mention du sexe dès lors que celle-ci ne correspond pas à la vérité.Aussi est-ce la jurisprudence qui a progressivement dégagé les solutions utiles aux demandes présentées devant les tribunaux.

En mars 1992, la Cour Européenne des Droits de l'Homme avait condamné la France, estimant qu'un refus de changement d'état-civil constituait une violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, traitant du droit de la vie privée et familiale.

Quelques mois plus tard, la Cour de cassation reconnaissait le droit aux transsexuels de changer d'état-civil. Ainsi après des années de bataille juridique, la France s'alignait-elle pour partie sur d'autres pays européens tels que la Suède, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas, le Danemark, la Turquie, la Finlande et l'Espagne.

L'initiative prise par le gouvernement français marque, au plan symbolique, une certaine flexibilité de la société française en matière de différences sociales. Mais notons qu'il lui aura fallu plus de 40 ans pour dissocier le "genre" du "sexe", sous la pression de la Convention européenne....
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Informations tirées d'un article de Jean-Yves Nau dans Slate.fr

3 commentaires:

  1. Une excellente chose sur le plan de la dignité.

    (Mais que devient la prise en charge ?)

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  2. Apparemment, la prise en charge devrait rester similaire, mais ne plus être justifiée par la "maladie mentale".

    A suivre, cependant... étant donné les restrictions du budget de la sécurité sociale.

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  3. Si le transsexualisme en France sort du cadre de la "maladie mentale", l'homosexualité y rencontre encore quelques problèmes... Voir certaines affaires récentes concernant l'éviction des candidats homosexuels sur les électorales.

    Beaucoup plus grave, la répression des homosexuels dans d'autres pays est dramatique, car l'homosexualité y est considérée comme un crime. Voir l'article dans Libération:
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    http://www.liberation.fr/culture/1101766-dans-mon-pays-la-sexualite-est-un-crime
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